Analyse détaillée du projet belge d’acquérir 11 F‑35A en 2025, du budget défense, du choix américain face aux options européennes, et des retombées industrielles.

En avril 2025, le Premier ministre Bart De Wever a confirmé l’intention de commander 11 avions F‑35A supplémentaires, portant la flotte belge future à 45 appareils. Cette décision vise à atteindre dès 2025 l’objectif OTAN de 2 % du produit intérieur brut (PIB) consacré à la défense, bien avant la date initialement prévue. Le dossier est sensible : le coût estimé se situe entre 1 et 1,5 milliard d’euros, le choix d’un équipement américain suscite des critiques au regard de l’industrie européenne, notamment le programme FCAS.

La Belgique confirme l’achat de 11 F‑35A et la hausse son budget défense

Le cadre budgétaire de l’effort militaire belge

En 2024, la Belgique consacrait 1,29 % du PIB à la défense, avec un budget de environ 8,6 milliards USD (7 milliards €). Pour atteindre 2 % du PIB en 2025, le gouvernement prévoit d’injecter 3,8 milliards € supplémentaires, via des recettes exceptionnelles (impôts sur les actifs gelés russes, recatégorisation d’investissements publics), emprunts et privatisations ciblées d’actifs publics pour un montant visé de 3,2 milliards €. Le budget défense atteindra donc environ 12,8 milliards € en 2025, à maintenir jusqu’en 2033. À partir de 2034, le niveau passera à 2,5 % du PIB, avec une perspective de 3,5 % à 2 % d’ici 2035, conforme aux recommandations de l’OTAN lors du sommet de La Haye 2025. Cependant, près de 20 % du budget défense est consommé par les pensions militaires, ce qui réduit la marge pour les investissements opérationnels véritables. Ces engagements soulèvent déjà des tensions financières internes, notamment sur le financement des politiques sociales.

L’acquisition des 11 F‑35A : calendrier, coût et industrialisation

L’ordre initial de 34 F‑35A, signé en 2018 pour environ 4 milliards €, incluait support, maintenance et formation jusqu’en 2030. Les avions sont produits à Fort Worth (Texas) ; les premiers huit livrés sont utilisés pour la formation US à Luke AFB. En avril 2025, le gouvernement belge a officiellement lancé l’idée d’un complément de 11 appareils, afin de consolider les capacités air‑air de son composante aérienne. Selon le ministre Theo Francken, ces 11 appareils seront assemblés en Europe, au centre de production de Cameri (Italie) dans le cadre du programme F‑35 international. Le coût est évalué entre 1 et 1,5 milliard €, soit un prix unitaire moyen proche de 80 millions €, incluant support et formation complémentaire. La signature du contrat est confirmée pour juillet 2025, avec les livraisons attendues après la première vague. La mise en service initiale devrait intervenir autour de 2027, avec pleine capacité opérationnelle en 2030. Ce choix offre une valeur économique européenne, mais ne modifie pas la dépendance technologique à Lockheed Martin.

Coopération européenne face au choix américain : FCAS vs F‑35

La Belgique participe depuis 2020 au programme futur FCAS (Future Combat Air System) mené avec la France, l’Allemagne et l’Espagne. Un engagement de 300 millions € est prévu pour financer la phase 2 (2026‑2030) du développement. Malgré cela, Dassault Aviation a critiqué le choix des F‑35 comme contradictoire avec l’investissement dans FCAS. Le gouvernement rétorque que la Belgique peut être pleinement partenaire de FCAS, tout en s’appuyant sur les F‑35 pour assurer ses obligations OTAN à court terme. Le débat souligne le dilemme industriel européen : encourager une flotte nationale basée sur un produit américain tout en restant impliqué dans les programmes européens prometteurs. Ce double engagement génère des interrogations sur la cohérence stratégique et l’autonomie de défense.

Retombées industrielles et position stratégique en Europe

La production des nouveaux avions en Italie et la proximité opérationnelle avec les autres opérateurs européens procureront des retombées techniques et financières pour l’industrie belge et européenne. Le plan stratégique prévoit également un investissement global de 34,8 milliards € entre 2026 et 2034 pour moderniser les capacités militaires, y compris la flotte aérienne, les drones MQ‑9B (troisième appareil prévu en 2027 pour 254 millions €), et des systèmes anti‑aériens Piorun, NASAMS, Skyranger. La montée en personnel vise 34 500 militaires d’ici fin 2034, contre 26 200 début 2025. Le renforcement de la réserve militaire et l’introduction d’un service volontaire d’un an en 2026 complètent cette évolution structurelle. Stratégiquement, disposer de 45 F‑35A d’ici 2030 place la Belgique parmi les États européens les mieux dotés en aéronefs de 5e génération, capable de participer à des missions OTAN exigeantes. Cela impose cependant un effort continu sur la formation, le soutien logistique, la maintenance et la coordination avec les alliés.

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Un choix stratégique belge

Le choix d’acheter des F‑35A supplémentaires est un signal clair vers l’intégration euro‑atlantique. Il répond à une exigence pragmatique : atteindre rapidement les normes OTAN sur le papier mais aussi en capacité opérationnelle réelle. Toutefois, la dépendance à un appareil américain limite la projection de souveraineté technologique. Investir dans FCAS plus tard ne compense pas le manque d’un appareil européen opérationnel aujourd’hui. La montée à 2 % du PIB est imposée par Bruxelles et Washington, mais génère des tensions sur les finances publiques et la protection sociale. Le compromis belge reflète une priorisation de la crédibilité militaire immédiate au détriment d’un développement autonome à long terme. La question reste ouverte : un tel choix servira‑t‑il réellement l’intérêt européen ou confortera‑t‑il une dépendance structurelle à Washington.

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