Le 17 octobre 2025, la frégate Forbin a réussi l’interception d’une bombe A2SM grâce à un tir de missile Aster 30. Exercice haute intensité et leçons pour la Marine nationale.
En résumé
Le 17 octobre 2025, la frégate Forbin, bâtiment de défense aérienne de la Marine nationale, a réalisé un tir réussi du missile Aster 30 contre une bombe A2SM (Armement Air-Sol Modulaire) lancée dans un scénario d’exercice simulant une menace de haute intensité. Cet exercice met en œuvre le système de combat naval PAAMS et confirme la capacité d’engagement automatisée de la frégate en défense de zone. L’entraînement vise à préparer les équipages à la contestation de l’espace aérien en mer, en particulier face à des armes air-sol de précision. La capacité de la Marine nationale à adapter ses moyens à de nouveaux types de menaces est ainsi renforcée : la Forbin prouve qu’elle peut non seulement intercepter des chasseurs ou missiles mais aussi des bombes guidées à lancement aérien. Cet événement redéfinit les exigences tactiques de la défense navale en opération.
Le contexte opérationnel et tactique de l’interception
La Marine nationale est engagée dans un environnement stratégique où les menaces aériennes évoluent rapidement : drones, missiles de croisière, bombes guidées à longue portée. Dans ce cadre, la frégate Forbin a été mise à l’épreuve dans un scénario d’exercice au large, simulant le lancement d’une bombe A2SM par un appareil de type chasse (le plus probablement un Rafale M). La cible, conçue pour une trajectoire basse, rapide, avec capacité de manœuvre, imposait une réaction rapide et un guidage précis. Le tir du Aster 30 a permis la destruction de la munition avant qu’elle atteigne sa phase terminale : la défaite d’un objectif réaliste marque un jalon dans la lutte navale contre les menaces aériennes et aéronavales. Ce type d’exercice confirme la pertinence du concept de défense antiaérienne navale intégrée, dans lequel la Forbin, avec son radar multi-fonctions Héraklès et son système de combat PAAMS, agit comme élément central d’une barrière anti-air.
Le déroulé technique de l’interception par Forbin
Lors de l’engagement, le radar Héraklès de la frégate a détecté la bombe A2SM en phase de chute ralentie et à faible altitude, après lancement depuis un appareil. Le système PAAMS (Principal Anti-Air Missile System) a calculé une solution de tir, activé le silo vertical Sylver A50 et lancé le missile Aster 30 depuis la frégate. Le missile, avec sa capacité de portée d’environ 100 km (capable d’engager des menaces à longue distance) et sa manœuvrabilité élevée, a intercepté la cible avant qu’elle n’entre dans sa phase finale d’impact. L’interception a été « largement automatisée », ce qui signifie que la chaîne détection-traitement-tir s’est déroulée à haut niveau d’autonomie, réduisant la latence humaine. Cette automatisation est un élément clé pour répondre à des menaces à vitesse élevée ou trajectoire imprévisible. La réussite technique témoigne de la performance combinée des capteurs, du calcul tactique et du missile, validant la capacité de Forbin à neutraliser des menaces non conventionnelles.
Le rôle des capacités du missile Aster 30 dans cette opération
Le missile Aster 30 constitue l’élément clé de la défense navale de zone de la Marine nationale. Il est complémentaire de l’Aster 15 (portée d’environ 30 km, pour autodéfense) dans l’architecture air-air/air-surface antiaérienne. Grâce à ses caractéristiques — radar actif, deux étages, manœuvrabilité élevée, capacité à engager missiles ou avions — il peut couvrir de vastes secteurs et s’adapter à des cibles évoluant à haute vitesse. Dans cette opération, l’Aster 30 a démontré sa capacité à intercepter non un avion mais une bombe guidée à lançeur aérien, ce qui élargit le spectre de menaces couvertes. Cette capacité accroît la résilience des groupes navals face à des attaques multiples ou combinées. Ainsi, l’emploi d’un missile de défense de zone devient indispensable alors que les formes de menaces évoluent vers des armes de précision à trajectoire basse ou surprise.

L’importance de l’entraînement et de la haute intensité pour la Marine nationale
L’exercice illustré par cette interception n’est pas une répétition ordinaire : il simule un scénario à haute intensité, avec une menace précise, rapide, peut-être furtive et exigeante. Pour les équipages de la Marine nationale, cela signifie maintenir un niveau de préparation élevé, automatiser certaines réactions, mais aussi assurer la coordination systèmes-équipage et la validité des procédures. Ces entraînements permettent de tirer des enseignements : équipements mis sous tension rapide, réactions de surveillance radars, gestion des spoilers électroniques adverses, mise en œuvre de la riposte. Ils contribuent à renforcer les capacités de combat de la Marine nationale, à développer la doctrine de la défense aérienne navale et à s’adapter aux « nouvelles formes de conflictualité ». En se confrontant à ces menaces, la Marine valide sa capacité à protéger les groupes aéronavals, les bâtiments stratégiques et les zones de déploiement hors métropole.
Les enseignements pour l’architecture de défense navale
Plusieurs enseignements techniques et stratégiques peuvent être tirés. D’abord, l’interception d’armes guidées air-surface via missile navire-air-défense montre que les bâtiments navals ne sont plus seulement des cibles ou des plateformes de projection, mais des nœuds actifs de la défense réseau-centrée. Ensuite, l’automatisation du processus (détection-tir) ouvre la voie à des chaînes de réaction plus rapides, indispensables pour contrer des munitions impulsives. Enfin, la démonstration renforce l’intérêt des missiles longue portée et de la défense de zone : dans un contexte où l’attaque ne vient pas seulement des bombes “classiques”, mais aussi des missiles anti-navires, des drones, des bombes planantes, la capacité à intercepter loin et tôt fait la différence. Pour la Marine nationale, c’est aussi une validation de l’investissement dans la classe Horizon, dans le système PAAMS et dans les concepts de défense anti-aérienne navale multi-capteurs.
Les perspectives et limites du dispositif
Bien que cette interception soit réussie, certaines limites et questions demeurent. Le test s’est déroulé dans un contexte d’exercice programmé, avec cible connue et conditions contrôlées. En opération réelle, la présence de brouillage, de saturation, de leurres ou de risques côtiers peut compliquer l’engagement. La dépendance à des capteurs performants, à des réseaux de données et à un appareillage en bon état impose une maintenance rigoureuse. Par ailleurs, le nombre de missiles Aster embarqués étant limité (Forbin dispose d’un nombre restreint de cellules Sylver A50), la capacité à absorber une attaque massive reste à tester. Enfin, si la cible était une bombe à trajectoire connue, l’engagement de plusieurs cibles multiples simultanées reste un défi. Il appartient désormais à la Marine nationale de développer cette capacité dans des conditions variées et de l’intégrer dans ses plans d’escorte de groupe aéronaval, de proximité ou de haute mer.
Les implications pour la Marine nationale et la supériorité en mer
La démonstration de la frégate Forbin ouvre une nouvelle page pour la Marine nationale. En effet, elle confirme que le bâtiment peut assurer une protection étendue des groupes navals français, dont le porte-avions Charles de Gaulle, contre des menaces qui ne sont plus seulement aériennes mais « hybrides » dans leur trajectoire, leur vitesse ou leur origine. La capacité de neutraliser une bombe guidée en transit redéfinit la notion d’espace de survie naval. Cela peut dissuader un adversaire de recourir à des attaques de saturation aérienne ou de bombes planantes contre des groupes navals français ou alliés. À l’heure où la concurrence navale se densifie et les menaces se diversifient, cette interception constitue un avantage tactique et stratégique significatif.
Le succès de cette opération souligne que la Marine nationale reste capable d’« anticiper » plutôt que de « réagir » : en entraînant ses personnels, en validant ses systèmes, en testant des scénarios de haute intensité, elle maintient une posture crédible. Le bâtiment Forbin, et plus largement la classe Horizon, confirment leur rôle dans la défense de zone majeure. Reste désormais à généraliser l’apprentissage, à étendre les capacités aux autres bâtiments et à s’intégrer pleinement dans les architectures alliées de défense navale.
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