Le Skydweller de l’US Navy a effectué un vol solaire de 73 heures sans interruption dans le cadre d’un essai de 220 heures, ouvrant la voie à une surveillance maritime prolongée.
Le 5 août 2025, la marine américaine a franchi une étape importante dans le domaine de la surveillance aérienne longue durée en menant à bien un vol ininterrompu de 73 heures avec le drone solaire Skydweller. Cet essai s’inscrit dans une campagne plus vaste de 220 heures de tests cumulés, conduite depuis la base de Stennis, dans l’État du Mississippi. Ce programme vise à valider les capacités de maintien en vol du Skydweller dans des conditions opérationnelles, sans ravitaillement et avec des cycles complets jour-nuit alimentés uniquement par l’énergie solaire. Ce type de drone, conçu pour les missions de surveillance maritime, représente une solution stratégique pour les armées cherchant à réduire leurs coûts d’exploitation tout en assurant une présence constante sur des zones étendues. L’US Navy compte sur cette plateforme pour densifier ses capacités ISR (Intelligence, Surveillance, Reconnaissance) en mer, particulièrement dans les zones éloignées ou dépourvues de bases terrestres.
La campagne d’essais de 220 heures et ses enjeux opérationnels
Le vol de 73 heures réalisé par le Skydweller a été accompli dans le cadre d’un programme expérimental conduit par le Naval Air Warfare Center Aircraft Division (NAWCAD). Les conditions météorologiques ont contraint les équipes à scinder les essais en plusieurs segments, mais la mission du 5 août a permis de démontrer une capacité complète de vol autonome, de jour comme de nuit, alimenté exclusivement par l’énergie solaire. Le drone est parvenu à maintenir une recharge suffisante de ses batteries pour fonctionner sans interruption pendant trois jours consécutifs, sans perte d’altitude critique ni retour au sol.
Les ingénieurs responsables du projet ont confirmé que rien, d’un point de vue technique, ne limite aujourd’hui la prolongation du vol au-delà de 220 heures. Cette endurance repose sur un équilibre énergétique rigoureux entre la production solaire diurne et la consommation nocturne, grâce à des algorithmes de gestion énergétique embarqués.
Ce programme s’inscrit dans le cadre de COLDSTAR, une initiative du Department of Defense visant à renforcer les capacités ISR sur les mers, notamment pour répondre aux missions confiées par le US Southern Command dans la lutte contre les narcotrafiquants, la surveillance des flux migratoires maritimes, ou encore la sécurisation des routes maritimes stratégiques.
Contrairement aux satellites ou aux avions pilotés, le Skydweller peut maintenir une position stationnaire sur une zone définie pendant plusieurs jours, à une altitude suffisante pour rester hors de portée des menaces tactiques tout en assurant une observation continue.
Les caractéristiques techniques du Skydweller et ses performances en vol
Le Skydweller est dérivé de l’appareil expérimental Solar Impulse 2. Il affiche une envergure de 72 mètres, soit autant qu’un Boeing 747, pour une masse maximale au décollage de 2 540 kg. Il est construit autour d’une structure en fibre de carbone, alliant légèreté et rigidité, avec une capacité d’emport de 360 kg de charge utile. Sa surface alaire est recouverte de plus de 17 000 cellules photovoltaïques, réparties sur une surface de 270 m².
Ces cellules peuvent générer jusqu’à 100 kilowatts en condition d’ensoleillement optimal. L’énergie ainsi produite alimente les moteurs électriques pendant la journée, tout en rechargeant un pack de batteries lithium-ion pesant environ 635 kg, destiné à fournir l’énergie nécessaire pendant les phases nocturnes.
Le drone est capable d’atteindre une altitude de croisière comprise entre 7 500 et 10 000 mètres. En journée, il peut monter jusqu’à 13 500 mètres pour maximiser l’ensoleillement, puis redescendre la nuit aux environs de 2 000 à 3 000 mètres afin de limiter la consommation énergétique. Cette variation d’altitude est pilotée automatiquement par l’ordinateur de bord selon des calculs prévisionnels d’énergie.
La charge utile peut inclure divers capteurs : caméras EO/IR, radar à synthèse d’ouverture allégé, récepteur AIS pour identifier les navires en mer, et équipements de relais de communication. Tous ces éléments peuvent fonctionner simultanément, selon les besoins de mission. L’ensemble est géré par une suite avionique redondante, avec quatre systèmes de pilotage automatiques sécurisés, conçus pour assurer la continuité de vol même en cas de défaillance d’un composant.
L’intérêt stratégique pour la surveillance maritime longue durée
L’un des atouts majeurs du Skydweller est sa capacité à remplacer temporairement des satellites ou des avions habités sur des missions de longue durée. Dans les zones maritimes vastes et peu surveillées, notamment dans l’Atlantique Sud, le Pacifique ou autour des détroits sensibles, ce drone peut être déployé depuis une base terrestre, grimper en altitude et couvrir une zone de plusieurs milliers de kilomètres carrés pendant plusieurs jours.
Pour la marine américaine, cela signifie une baisse significative du coût à l’heure de vol. En effet, l’absence de carburant, de maintenance fréquente, de personnel embarqué, et de logistique de soutien en vol permet de réduire les dépenses opérationnelles.
Le drone peut également agir comme relais de communication pour des navires isolés ou des forces spéciales déployées à distance, assurant une continuité de transmission sans passer par les satellites géostationnaires. De plus, en cas de situation de crise, il peut jouer un rôle de veille persistante au-dessus d’une zone sensible, avec des capacités d’observation renforcées grâce à sa stabilité et son endurance.
À moyen terme, plusieurs usages conjoints sont envisagés : couplage avec des drones tactiques opérant plus bas en altitude, couverture ISR d’un groupe aéronaval, ou encore contrôle maritime permanent dans des zones de tensions (golfe de Guinée, mer de Chine méridionale).
Les limites actuelles et les pistes d’évolution technique
Malgré ses performances, le Skydweller n’est pas exempt de contraintes. Sa dépendance à l’ensoleillement rend son emploi complexe en haute latitude, en hiver, ou par temps nuageux persistant. De plus, sa faible vitesse (environ 90 km/h en croisière) et son rayon d’action limité à des zones définies par le rendement énergétique le rendent inadapté aux missions de reconnaissance dynamique ou d’interception.
Pour renforcer sa polyvalence, plusieurs améliorations sont envisagées par Skydweller Aero et ses partenaires. Des cellules solaires à rendement plus élevé, une gestion thermique optimisée des batteries, et des solutions d’automatisation avancée permettraient d’augmenter l’endurance jusqu’à 90 jours, voire au-delà dans certaines conditions.
Enfin, une version modulaire pourrait permettre de configurer le drone pour des missions spécialisées : guerre électronique, surveillance anti-piraterie, contrôle des émissions polluantes des navires, ou encore appui aux opérations humanitaires avec capteurs dédiés.
Ce type de plateforme ne remplacera pas les systèmes existants, mais il est en passe de devenir un complément stratégique efficace, notamment dans une logique de dissuasion passive et de présence discrète mais permanente.
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