Analyse comparative détaillée de la résistance à la guerre électronique des avions de chasse Su-35 et Rafale.

La guerre électronique (GE) est devenue un élément central dans les conflits modernes, influençant directement la supériorité aérienne. Les avions de chasse tels que le Su-35 russe et le Rafale français intègrent des systèmes de GE avancés pour détecter, brouiller et neutraliser les menaces. Cet article examine en détail les capacités de résistance à la GE de ces deux appareils, en mettant en lumière leurs systèmes, performances et implications opérationnelles.

Le système de guerre électronique du Su-35

Le Su-35 est un avion de chasse multirôle de génération 4++, conçu par le bureau Sukhoi pour renforcer les capacités tactiques de l’aviation russe. Bien que ne disposant pas des caractéristiques d’un appareil furtif, il compense en partie cette lacune par un ensemble de systèmes dédiés à la guerre électronique, en particulier le module Khibiny L-175V. Ce système est monté en nacelle sur les extrémités alaires et permet de brouiller les radars ennemis, de dissimuler la signature radar de l’appareil, et de simuler de fausses cibles électromagnétiques, afin de perturber les guidages radar adverses. Son efficacité est cependant conditionnée à la densité de l’environnement électromagnétique et à la génération des menaces rencontrées.

Le Su-35 est équipé du radar Irbis-E, un radar à balayage électronique passif (PESA), qui revendique une portée maximale de 400 kilomètres contre une cible de type chasseur (section équivalente radar de 3 m²). S’il permet une détection à longue portée et un suivi simultané de plusieurs cibles, il présente toutefois une vulnérabilité accrue aux brouillages modernes, notamment ceux générés par les systèmes occidentaux à technologie AESA. L’absence de fonctionnement en mode « low probability of intercept » (LPI) limite en outre sa discrétion électromagnétique.

À ces dispositifs s’ajoute un capteur infrarouge OLS-35, non émissif, utile pour le repérage passif de cibles dans un rayon estimé à 50 km, et un système d’alerte radar (RWR) intégré au système de défense. Néanmoins, la fusion des capteurs du Su-35 reste partiellement centralisée, contrairement aux standards plus intégrés d’un Rafale. Cette lacune nuit à la réactivité du pilote de chasse dans un combat aérien de haute intensité où la coordination instantanée des senseurs est cruciale. Le Su-35 reste donc performant, mais souffre d’un retard technologique dans l’intégration électronique face aux standards de l’OTAN.

La résistance à la guerre électronique : Su-35 vs Rafale

Le système de guerre électronique du Rafale

Le Rafale, avion de chasse polyvalent de Dassault Aviation, repose sur une architecture intégrée, pensée dès sa conception pour le combat en environnement saturé électroniquement. Son système de guerre électronique repose sur SPECTRA (Système de Protection et d’Évitement des Conduites de Tir du Rafale), développé par Thales et MBDA, qui constitue l’un des systèmes les plus aboutis en service dans les forces de l’air occidentales.

SPECTRA offre une couverture sphérique complète, assurant la détection, l’identification et la localisation précise des menaces électromagnétiques et infrarouges. Il comprend des antennes radar réparties sur le fuselage, un détecteur d’alerte laser, un détecteur de départ de missile et des brouilleurs actifs. En cas de menace, il est capable de déclencher automatiquement des contre-mesures électroniques : brouillage ciblé, déviation de missiles à guidage radar, et largage de leurres électromagnétiques et infrarouges. Le tout fonctionne en temps réel, sans intervention directe du pilote de chasse, réduisant la charge cognitive en combat.

Le Rafale est également équipé du radar RBE2 AESA, radar à antenne active offrant une meilleure résistance aux brouillages, une détection plus rapide, une précision accrue, ainsi qu’une signature électromagnétique réduite. Il autorise des modes passifs (comme la détection de brouilleurs), renforce les capacités LPI (Low Probability of Intercept) et permet une fusion de données poussée avec les capteurs de SPECTRA et le système optronique frontal (OSF).

Un autre atout opérationnel est la supercroisière : le Rafale peut maintenir une vitesse supersonique (environ Mach 1,4, soit 1 728 km/h) sans postcombustion. Cela réduit sa signature infrarouge et limite les émissions détectables, un avantage certain en situation de GE. Combiné à SPECTRA, cela donne au Rafale une capacité de survie élevée dans un environnement électromagnétiquement dégradé, notamment contre les radars adverses, les systèmes sol-air modernes ou les avions dotés de capteurs longue portée.

En matière de guerre électronique, le Rafale se positionne donc comme une plateforme aboutie, bénéficiant d’une intégration logicielle avancée, de capteurs fusionnés et d’un système de protection proactif capable de détecter, brouiller et éviter les menaces avant même qu’elles ne soient effectives.

La résistance à la guerre électronique : Su-35 vs Rafale

La comparaison opérationnelle et les implications stratégiques

La confrontation entre le Su-35 et le Rafale dans le domaine de la guerre électronique met en évidence des approches technologiques radicalement différentes. L’avantage du Rafale réside dans l’intégration poussée de ses capteurs, de ses systèmes de protection et de son architecture de combat en réseau. Cette fusion de données – combinant radar AESA, guerre électronique, optronique et liaison de données tactique – permet au pilote de chasse d’obtenir une vision unifiée, cohérente et priorisée de l’environnement aérien.

Le système SPECTRA, grâce à son traitement automatisé des menaces et sa capacité à neutraliser ces dernières avant qu’elles ne deviennent effectives, donne au Rafale une supériorité qualitative. Il peut intervenir de manière préventive contre les détections, tout en restant difficile à localiser électromagnétiquement. Dans un théâtre de guerre dense en signaux, brouilleurs et radars, cette capacité à agir tout en restant discret est déterminante. Elle permet également au Rafale d’évoluer efficacement sans l’appui permanent d’un avion de guerre électronique dédié, ce qui le rend plus autonome dans des opérations dites de pénétration.

À l’inverse, le Su-35 mise sur des capteurs performants mais moins intégrés, et sur une manœuvrabilité aérodynamique exceptionnelle, notamment grâce à ses tuyères vectorielles. Son radar Irbis-E, bien que très puissant, fonctionne en mode PESA, ce qui le rend plus facile à brouiller et plus exposé à la détection par des capteurs passifs adverses. Son système Khibiny reste pertinent contre des menaces peu complexes, mais son efficacité est discutée face à des systèmes modernes à traitement numérique adaptatif. Le Su-35 conserve cependant un avantage dans le domaine du combat rapproché (dogfight), où la détection infrarouge passive et la manœuvrabilité peuvent compenser un déficit en GE.

D’un point de vue stratégique, dans un conflit aérien de haute intensité, la supériorité du Rafale réside dans sa résilience numérique et son agilité tactique permise par ses systèmes électroniques. Le Su-35, sans être obsolète, risque de subir un déficit de survie en environnement fortement saturé électromagnétiquement, sauf à opérer en coordination étroite avec des plateformes de brouillage lourdes comme le Krasukha. Ce décalage technologique pourrait influencer la répartition des rôles dans un affrontement entre forces équipées de ces appareils.

La résistance à la guerre électronique est un facteur déterminant dans la supériorité aérienne moderne. Le Rafale, avec son système SPECTRA et son radar AESA, offre une protection avancée contre les menaces électroniques, tandis que le Su-35, bien que performant, présente des vulnérabilités dues à une intégration moins poussée de ses systèmes. Dans un environnement de guerre électronique intense, le Rafale semble mieux préparé pour assurer la survie de son pilote et la réussite de sa mission.

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