Kratos développe les drones Apollo et Athena, des appareils modulaires conçus pour renforcer les capacités des chasseurs européens de 3e et 4e générations.

Une réponse aux besoins spécifiques des forces aériennes européennes

Kratos Defense & Security Solutions développe actuellement deux drones tactiques appelés Apollo et Athena, en vue de répondre aux exigences opérationnelles des armées européennes. Contrairement aux programmes conçus exclusivement pour des avions de 5e génération comme le F-35, ces appareils sont conçus pour interagir avec des plateformes existantes, en particulier les avions de chasse de 3e et 4e générations largement utilisés sur le continent, comme les F-16, les Mirage 2000 ou les Eurofighter Typhoon. Le choix stratégique de viser ce segment s’explique par la structure hétérogène des flottes européennes, composées d’avions plus anciens mais encore largement déployés. Kratos souhaite proposer une solution accessible, rapide à déployer et adaptable aux doctrines nationales. L’approche modulaire des drones permet de répondre à différents profils de mission (surveillance, appui, brouillage, reconnaissance armée) sans dépendre d’une architecture lourde ou centralisée. Ce positionnement technique vise à combler un besoin identifié : fournir un multiplicateur de force aux avions existants sans nécessiter une refonte complète de la flotte ou l’acquisition de nouveaux chasseurs furtifs.

Drones Apollo et Athena de Kratos : une solution modulaire pour l'Europe

Caractéristiques techniques et performances prévues

Les drones Apollo et Athena sont plus petits que le XQ-58 Valkyrie, également conçu par Kratos. Ce choix dimensionnel permet de réduire l’encombrement logistique, tout en facilitant les opérations à partir de pistes sommaires ou de bases avancées. Les deux modèles sont conçus pour opérer à des vitesses subsoniques élevées, avec une enveloppe de vol optimisée pour les missions de pénétration en appui ou en éclaireur. Leur cellule serait furtive, notamment via un design à faible signature radar, des prises d’air discrètes et un traitement spécifique des échappements pour limiter les émissions infrarouges. Les drones sont également modulaires, une caractéristique essentielle permettant d’interchanger les modules mission selon les objectifs tactiques : capteurs ISR, brouilleurs, pods de communication, ou charges militaires. Kratos annonce vouloir contenir le prix unitaire sous la barre des 5 millions de dollars, soit environ 4,6 millions d’euros, ce qui les positionne comme une alternative économique aux drones plus lourds ou spécialisés comme le MQ-9 Reaper. Cette maîtrise des coûts vise à élargir le spectre d’acquéreurs potentiels, notamment auprès des États européens aux budgets militaires restreints.

Une intégration ciblée avec des chasseurs existants

La priorité d’Apollo et d’Athena est de pouvoir être intégrés dans des opérations menées avec des avions de chasse pilotés déjà en service. Kratos cible notamment les F-16 et les Mirage 2000, qui sont nombreux en Europe, mais aussi les Typhoon et Gripen. Le but n’est pas seulement de les accompagner, mais de prendre en charge une partie des missions à risque ou répétitives, tout en étendant les capacités de ces chasseurs grâce à des fonctions embarquées réparties entre plusieurs drones. Un Athena doté d’un module de guerre électronique peut brouiller les radars adverses pour un F-16 qui engage sa cible. De même, un Apollo armé peut exécuter une frappe à distance, tandis que le chasseur reste en dehors de la zone de danger. Ces drones peuvent aussi agir comme éclaireurs avancés, détectant les menaces sans signature humaine et transmettant en temps réel les données. Ce concept de « rôle distribué » permet de multiplier les options tactiques, tout en évitant de surcharger chaque appareil d’une panoplie complète de systèmes coûteux et complexes.

Une adaptation aux contraintes géographiques européennes

Les missions militaires en Europe présentent des particularités : les distances à couvrir sont moindres que dans la région indo-pacifique, mais les espaces aériens sont plus saturés, cloisonnés et ciblés. Kratos a intégré ces paramètres dans la conception d’Apollo et d’Athena. Dans un contexte européen, l’endurance est moins critique que la charge utile et la capacité à effectuer des frappes précises ou de la reconnaissance en environnement complexe. Cela permet d’utiliser l’espace structurel du drone non pas pour du carburant, mais pour y installer des équipements lourds ou des armements. Cette flexibilité autorise des configurations surchargées en capteurs pour des missions de renseignement tactique, ou des charges explosives pour de l’appui aérien rapproché. Le théâtre européen nécessite aussi une forte capacité de résilience en cas de brouillage ou d’engagement rapide. C’est pourquoi les drones peuvent être configurés régionalement, selon les priorités de chaque client : les forces scandinaves, polonaises ou grecques n’ont pas les mêmes priorités que la France ou l’Allemagne, ce qui impose une logique modulaire adaptable et segmentée.

Des avantages opérationnels concrets

L’emploi combiné de drones Apollo ou Athena avec des avions pilotés offre plusieurs bénéfices opérationnels mesurables. D’abord, il s’agit d’un moyen direct de réduire le risque humain lors des missions offensives ou de reconnaissance. Le drone peut être engagé dans des zones à haute menace, libérant le chasseur piloté de cette contrainte. Ensuite, la logique modulaire permet une répartition optimisée des fonctions entre plusieurs vecteurs. Plutôt que d’équiper chaque drone d’un ensemble complet et onéreux de capteurs et d’armes, chaque appareil peut être spécialisé dans une tâche. Par exemple, sur un essaim de six drones, trois peuvent porter des capteurs ISR, et les trois autres des armements air-sol. Cela permet une mutualisation intelligente, tout en diminuant le coût unitaire et en réduisant la charge logistique. En cas de perte d’un drone, la mission reste réalisable. Enfin, ces appareils permettent une plus grande saturation de l’espace aérien face à l’adversaire, rendant plus complexe l’identification des cibles prioritaires. Ce brouillage tactique est un levier direct de survie et d’efficacité pour les unités déployées.

Des perspectives industrielles et stratégiques à suivre

Kratos a confirmé la signature de contrats de développement pour Apollo et Athena, sans en divulguer les détails ni les partenaires. L’entreprise, exclue de la première phase du programme CCA américain, souhaite se positionner sur la seconde itération, qui pourrait intégrer des acteurs étrangers. Ce positionnement stratégique permettrait aux drones Apollo et Athena de trouver un rôle non seulement en Europe, mais aussi dans les projets communs avec les États-Unis, le Royaume-Uni ou l’Australie. En Europe, plusieurs programmes parallèles sont en cours : le SCAF franco-allemand-espagnol, le Mosquito britannique, ou le Bayraktar turc. La proposition de Kratos pourrait compléter ces programmes existants, en apportant une solution plus rapide à mettre en œuvre et moins coûteuse, notamment pour les États de second rang ou sans grande industrie de défense aérienne. Si Kratos parvient à livrer un produit fiable, modulaire et bon marché, Apollo et Athena pourraient devenir des acteurs structurants des futures doctrines d’emploi des drones d’appui. Leur commercialisation représenterait aussi un signal fort d’un changement dans la conception occidentale de la supériorité aérienne.

Drones Apollo et Athena de Kratos : une solution modulaire pour l'Europe

Un rôle possible dans le programme CCA et l’intérêt des forces américaines

Bien que Kratos n’ait pas été retenu pour la première phase (Increment 1) du programme Collaborative Combat Aircraft (CCA) mené par l’US Air Force, l’entreprise affiche clairement son ambition d’intégrer la seconde phase de développement, connue sous le nom d’Increment 2. Celle-ci devrait mettre davantage l’accent sur des solutions moins complexes, plus abordables, avec une ouverture possible à des coopérations internationales. Dans cette logique, Apollo et Athena, avec leur architecture modulaire, leur coût inférieur à 5 millions de dollars, et leur compatibilité avec des flottes existantes, répondent aux critères recherchés. Par ailleurs, l’US Marine Corps teste déjà des drones XQ-58 Valkyrie, conçus par Kratos, pour des missions de reconnaissance et d’appui. Ces expérimentations ouvrent la voie à une adoption élargie de drones plus compacts et spécialisés. L’US Navy, quant à elle, explore des concepts de drones dits « consommables », destinés à des missions à usage unique. Dans ce contexte, Apollo et Athena pourraient jouer un rôle dans l’extension du potentiel naval embarqué, notamment pour des frappes en essaim ou des missions de saturation à partir de porte-avions.

Les drones Apollo et Athena de Kratos représentent une avancée significative dans le domaine des systèmes aériens sans pilote. Conçus pour répondre aux besoins spécifiques des forces aériennes européennes, ces appareils modulaires offrent une combinaison de performances élevées, de flexibilité opérationnelle et de coûts maîtrisés. Leur développement et leur intégration futurs pourraient transformer les stratégies aériennes en Europe, en renforçant les capacités des chasseurs existants tout en minimisant les risques pour les pilotes.

Nous sommes le spécialiste du vol en avion de chasse.